En perte au premier semestre, le troisième transporteur mondial de conteneurs vise 1 milliard de dollars d’économies sur dix-huit mois.
La « Bonne Mère » n’a pas fait de miracle… Comme les autres transporteurs de conteneurs maritimes, le marseillais CMA CGM a pris de plein fouet l’effondrement des tarifs de transport (taux de fret). Il a enregistré au deuxième trimestre de son exercice 2016, dont les résultats financiers ont été publiés vendredi, un recul de ses revenus moyens par boîte de 6 % par rapport au début de l’année, et de 18,8 % comparé au deuxième trimestre 2015.
Le chiffre d’affaires du numéro trois mondial du secteur a reculé d’autant, pour s’établir à 3,3 milliards de dollars, contre 4,1 milliards un an plus tôt. Et le résultat net part du groupe, qui était bénéficiaire de 156 millions de dollars au deuxième trimestre 2015, s’affiche en perte de 109 millions.
« Valeur barométrique »
Toute la semaine, des analystes ont alimenté les rumeurs d’une situation financière très tendue pour le numéro trois mondial du secteur. Or, « CMA CGM est une valeur barométrique dont l’activité a un effet domino sur le niveau de confiance des investisseurs dans cette industrie », explique aux « Echos » un expert à Londres. Dans une note publiée ce jeudi, les spécialistes du trading de crédit de HSBC mettaient ainsi en garde leurs clients, après avoir calculé un effondrement de 69 % de l’excédent brut d’exploitation (Ebitda) au deuxième trimestre 2016 comparé à celui un an plus tôt et une explosion de la dette (+185 %) après l’achat de NOL, payé 2,4 milliards de dollars.
A NOTER : Au 4 septembre 2016, la part de marché mondiale de CMA CGM dans le transport de conteneurs s’établissait à 10,8 %, selon le classement de référence d’Alphaliner.
« La liquidité de l’entreprise est susceptible d’avoir chuté autour de 800 millions d’euros », alertait Julien Raffelsbauer, le patron du bureau d’analyse de l’établissement. Ce à quoi le cofondateur d’un « hedge fund » bien en vue à la City renchérissait en affirmant que pour CMA CGM « les options se raréfient ». Le vice-président du groupe, Rodolphe Saadé, a apporté vendredi un démenti formel. Cité dans un communiqué, il affirme que le groupe familial peut s’appuyer sur « un fort niveau de liquidité » pour passer cette mauvaise période. Constatant « la persistance d’un contexte de marché difficile avec un niveau de fret insuffisant qui pèse sur [leurs] revenus et [leurs] marges », il ajoute que « l’acquisition de NOL est pleinement financée » et souligne « sa pertinence stratégique ». L’armateur détenait, après cette acquisition, 11,2 % de part de marché mondial (contre 8,2 % avant) et 14 % sur les lignes encore très actives entre l’Asie et les Etats-Unis, lui permettant de rester solidement installé sur la troisième marche du podium mondial, loin devant le chinois Cosco.
Deuxième plan massif
Le groupe marseillais a également retenu les leçons de la crise qu’il a traversée en 2008 et riposté sans tarder à cette chute des taux de fret. Dès le début de l’été, plusieurs lignes ont été fermées ou allégées, des locations de navires ont été renégociées, des services de livraison de proximité à partir des grands ports (un axe jugé stratégique pour CMA CGM) ont été renforcés et des commandes de navires ont été reportées sur 2017. « Grâce à l’effet conjugué de la baisse des prix du fuel, ces mesures ont réduit de 10,7 % nos coûts unitaires », affirme le groupe, qui a parallèlement mis en oeuvre dès le 1er juillet un programme d’économies de 1 milliard d’euros sur dix-huit mois, le deuxième plan massif depuis le début de la décennie.
Source//www.lesechos.fr/Paul Molga – Le 04/09/16